Mission D’observation Electorale De L’union Africaine Pour Le Second Tour De L’election Presidentielle Du 29 Decembre 2019 En Republique De Guinee-Bissau
Mission D’observation Electorale De L’union Africaine Pour Le Second Tour De L’election Presidentielle Du 29 Decembre 2019 En Republique De Guinee-Bissau
décembre 30, 2019
DECLARATION PRELIMINAIRE
1. INTRODUCTION
Le second tour de l’élection présidentielle du 29 décembre 2019 constitue un tournant historique dans le système politique. Les électeurs ont voté dans le calme et la sérénité. Ils ont fait preuve de maturité démocratique.
Suite à l’invitation du Gouvernement Bissau-guinéen, le Président de la Commission de l’Union Africaine (UA), Son Excellence Monsieur (SEM) Moussa Faki Mahamat, a dépêché une Mission d’Observation Electorale (MOEUA) pour suivre le déroulement du scrutin. Elle est conduite par SE Dr Joaquim Rafael BRANCO, ancien Premier Ministre de la République Démocratique de São Tomé e Principe. Elle comporte 13 Observateurs de Long Terme (OLT) et 40 Observateurs de Court Terme (OCT) répartis en 28 équipes. Les OLT ont été déployés dans le pays depuis le 19 novembre 2019. Ils y resteront jusqu’au 5 janvier 2020. Les OCT étaient arrivés le 22 décembre 2019. Ils y seront jusqu’au 3 janvier 2020.
La MOEUA est composée d’un Ambassadeur accrédité auprès de l’UA, de Parlementaires panafricains, de responsables d’organes de gestion des élections, de membres d’organisations de la société civile, d’experts électoraux, de spécialistes des Droits humains, genre, médias et de représentants d’organisations de la jeunesse. Les observateurs de la Mission proviennent de trente-trois (33) pays représentatifs de la diversité géographique du continent, à savoir : Algérie, Angola, Bénin, Burkina-Faso, Burundi, Cameroun, Cabo Verde, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Djibouti, Ethiopie, Gabon, Ghana, Guinée, Guinée Equatoriale, Madagascar, Mali, Maroc, Mauritanie, Mozambique, Niger, République Centrafricaine, République Démocratique du Congo, Rwanda, São Tomé e Principe, Sénégal, Soudan, Tchad, Togo, Tunisie, Zambie et Zimbabwe. Ils étaient déployés dans les neuf (9) régions du pays, à savoir : le Secteur autonome de Bissau, Biombo, Bafata, Gabu, Oio, Quinara, Tombali, Cacheu et les îles de Bolama/Bijagos. Ils ont observé 334 bureaux de vote dont 189 (soit 56,58%) en milieu urbain et 145 (soit 43,42%) en zone rurale.
2. OBJECTIF ET METHODOLOGIE DE LA MISSION
La MOEUA a pour principal mission d’évaluer objectivement, de manière indépendante et professionnelle l’intégrité, la crédibilité, la régularité et la transparence de l’élection présidentielle. Elle s’inscrit dans le cadre des principes édictés par les instruments internationaux pertinents, notamment la Charte africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance (CADEG) de 2012, la Déclaration de l’OUA/UA sur les principes régissant les élections démocratiques en Afrique, les Directives africaines pour les missions d’observation et de suivi des élections de 2002 et la Déclaration des principes pour l’observation internationale des élections des Nations Unies de 2005. Elle prend également en compte les instruments régionaux et le cadre juridique national qui organisent les élections.
La Mission a rencontré les parties prenantes du processus, en particulier les deux candidats, le Président de la Commission Nationale Electorale (CNE) et les autres Missions d’observation électorale.
Cette Déclaration préliminaire se fonde sur les rapports hebdomadaires des OLT, les résultats des différentes rencontres avec les parties prenantes et l’observation électorale du jour du scrutin faite par les différentes équipes déployées sur le terrain. Un rapport final exhaustif sera produit à la fin du séjour de la Mission dans le pays.
3. CONSTATS ET OBSERVATIONS PRELIMINAIRES
3.1. Contexte politique de l’élection
Le second tour de la présidentielle a opposé Domingos Simões PEREIRA à Umaro Sissoco EMBALO. La majorité des candidats recalés à l’issue du premier tour ont donné des consignes de vote en s’alliant à l’un ou l’autre candidat qualifié. Les nouvelles alliances politiques avaient créé des dissensions au sein des partis concernés sans ébranler fondamentalement l’orientation donnée par les leaders. Le climat général était pacifique. Toutefois, l’élection s’est déroulée sur fond de tensions sociales au sein de l’administration publique du fait des retards de salaires et de grève des enseignants. La MOEUA a constaté dans certains cas, l’instrumentalisation du facteur ethnique et religieux dans l’espace politique. A cela s’ajoute, l’utilisation contradictoire d’un narratif sur l’Etat-Nation et la souveraineté populaire comme facteur d’identification politique et de clivage partisan. En outre, la saisie du matériel de campagne du candidat EMBALO à la frontière du pays a failli déboucher sur une confrontation entre les acteurs. Néanmoins, la situation a fini par s’arranger grâce aux bons offices de la Communauté internationale notamment la CEDEAO.
3.2. Cadre juridique
Le second tour de l’élection présidentielle est surtout régi par les articles 109 à 112 de la loi n°10/2013 du 25 septembre relative à l’élection à la Présidence de la République et à l’Assemblée Nationale Populaire. L’article 111 confère à la CNE la compétence de fixer la date du second tour qui doit se tenir dans un délai de 21 jours à compter de la publication des résultats à l’issue du premier tour. L’article 112 dispose que la durée de la campagne électorale est de 15 jours. Les articles 50 à 97 réglementent la composition et le fonctionnement des bureaux de vote, le vote anticipé, le déroulement des opérations, le dépouillement et la proclamation des résultats.
3.3. Administration électorale
La Commission Nationale Electorale (CNE) avait distribué les 21 et 22 décembre 2019 le matériel sensible aux Commissions Régionales Electorales (CRE). L’encre indélébile qui avait cristallisé l’attention lors du premier tour a été changée. Le matériel lourd était conservé pour être réutilisé pendant ce second tour. La Mission salue les efforts accomplis pour améliorer l’organisation matérielle de l’élection. Cependant, elle a constaté quelques retards de paiements d’honoraires de membres de CRE et la non fourniture de cartes et puces téléphoniques surtout dans les îles et les zones reculées pour permettre une meilleure coordination dans le déploiement du matériel et du personnel électoral. Enfin, le vote anticipé a été mieux compris grâce aux sensibilisations des parties prenantes par la CNE et les représentants des candidats.
3.4. Le fichier électoral
Le fichier électoral n’a pas changé entre les deux tours. Il comportait : 761 676 électeurs issus du recensement de 2018-2019. Cependant, les citoyens qui avaient perdu leurs cartes d’électeurs n’ont pas pu recevoir de duplicatas. Or, l’article 26 alinéa 3 de la Loi N°10/2013 susvisée oblige la Commission de recensement d’émettre une nouvelle carte d’électeur avec la mention duplicata en cas de perte jusqu’à 10 jours avant la date de l’élection. Cette disposition n’a pas été observée par GTAPE faute de consensus politique entre les parties prenantes.
3.5. Coalitions des candidats
Dans la perspective de vouloir remporter l’élection, les candidats se sont mis à nouer des alliances au second tour. Domingos Simoes PEREIRA a été soutenu entre autres par Baçiru DJA, Mamadu Iaia DJALO et Idrissa DJALO alors que Umaru Sissoco EMBALO l’a été notamment par Nuno NABIAM, José Mario VAZ et Carlos Domingos GOMES. Ces coalitions ont quelques fois été contestées au sein des partis politiques membres pour diverses raisons. Elles ont été finalement appuyées par la plupart des responsables des partis concernés.
3.6. Déroulement de la campagne électorale
La campagne électorale s’est déroulée du 13 au 27 décembre 2019. Les candidats ont publié leurs programme et itinéraire de campagne. La CNE les a exhortés à endosser le Code de Bonne Conduite et de rejeter les discours de haine et la violence. La Mission a constaté quelques cas où des soutiens d’Umaru Sissoco EMBALO l’avaient saisi concernant des problèmes logistiques avec l’administration.
3.7. Médias
L’article 37 de la Loi susvisée prévoit une couverture médiatique quotidienne des activités des candidats de 10 minutes à la radio nationale et de 5 minutes, à la Télévision de Guinée-Bissau (TGB). Néanmoins, ils n’ont pas accepté de faire leurs interviews à la TGB les 18 et 19 décembre 2019. Cependant, ils ont participé au Débat Présidentiel du 26 décembre. La CNE et les autres parties prenantes ont recouru au service des médias privés locaux qui utilisaient les langues nationales pour véhiculer leurs messages aux citoyens de l’intérieur du pays.
3.8. Société Civile
La société civile a joué un rôle non négligeable dans le suivi inclusif du processus électoral. Parmi ses membres les plus actifs pendant ce scrutin on peut citer : la Plateforme Politique des Femmes de Guinée-Bissau qui regroupe environ 600 organisations et le Mouvement National de la Société Civile. Ces organisations avec d’autres sont intervenues dans le monitoring des populations sur le processus électoral et le vote. Une Salle de Situation et de Veille Electorale a été établie à l’Hôtel AZALAÏ comme ce fût le cas lors du premier tour du scrutin. Cette initiative mérite d’être appuyée et pérennisée pour renforcer l’éducation et la participation électorale des populations. La Mission a constaté, toutefois, que la société civile n’est toujours pas autorisée à observer les élections dans le pays.
3.9. Sensibilisation
La CNE, les candidats, leurs alliés et la société civile se sont mobilisés pour sensibiliser efficacement les populations à aller voter le jour du scrutin. Les médias nationaux se sont distingués comme étant de puissants vecteurs éducatifs en matière d’éveil des consciences et de mobilisation partisane. Les réseaux sociaux ont aussi joué un rôle innovant ainsi que les supports classiques à travers les spots, les affiches, les meetings et les caravanes.
3.10. Sécurité Le volet sécuritaire du processus électoral a été assuré dans le cadre d’un Plan stratégique opérationnel initié d’un commun accord par le Commandement conjoint des Forces de défense et de sécurité nationales et celles de l’ECOMIB de la CEDEAO. Les patrouilles régulières effectuées dans ce cadre ont concouru à maintenir la paix sociale et les conditions d’une organisation réussie du processus électoral.
4. OBSERVATIONS LE JOUR DU VOTE
Le vote s’est globalement bien déroulé sans incidents majeurs.
4.1. Vote par anticipation
Le vote anticipé concerne surtout les forces de sécurité et de défense nationale. Il a eu lieu le 26 décembre 2019 conformément aux dispositions des articles 52 et 53 de la Loi N°10/2013. La MOEUA avait constaté du retard avant le démarrage effectif des opérations de vote par anticipation. Dans certains endroits comme à Biombo, la liste des électeurs n’était pas disponible. Globalement, le vote anticipé était très faible comparé au premier tour. En effet, la Mission a constaté qu’il y avait 20% des bureaux de vote observés qui ont reçu des bulletins de vote par anticipation.
4.2. Ouverture des bureaux de vote
La Mission a constaté avec satisfaction que la quasi-totalité des bureaux de vote observés ont ouvert à l’heure (7h00 du matin). Le personnel électoral était à son poste avant l’ouverture des bureaux de vote. Chacun d’eux avait entre 3 et 4 membres. Dans la plupart des cas, les procédures d’ouverture étaient bien respectées. Les urnes vides ont été présentées aux délégués des candidats et aux électeurs présents avant d’être scellées. Le matériel électoral et les bulletins de vote étaient disponibles en quantité suffisante.
4.3. Matériel électoral
Le matériel électoral a été mis en place à temps et en quantité suffisante dans les bureaux de vote observés. Contrairement au premier tour, la qualité de l’encre indélébile était meilleure. La Mission a constaté que dans de rares cas des isoloirs ont été aménagés localement.
4.4. Participation électorale
La participation électorale a été forte surtout dans la matinée. Les deux camps ont mobilisé leurs soutiens au regard de la présence effective de leurs délégués dans les bureaux de vote.
4.5. Participation des Femmes
La MOEUA a constaté avec satisfaction que les électrices ont participé activement au vote. En revanche, 28,65% des délégués des candidats dans les bureaux de vote observés étaient des femmes contre 28,22% lors du premier tour. Par contre, le taux de représentation féminine du personnel électoral des bureaux de vote visités est passé de 56,46% lors du premier tour à 43,83% lors du second tour.
4.6. Participation des personnes âgées, vulnérables ou vivant avec un handicap et les femmes enceintes ou allaitantes.
La MOEUA a noté avec satisfaction les efforts adoptés visant à faciliter le vote des personnes âgées, vulnérables ou vivant avec un handicap et les femmes enceintes ou allaitantes. Des rampes d’accès ont été parfois aménagées pour faciliter l’exercice de leurs droits électoraux. Cette catégorie d’électeur a pu bénéficier de l’assistance des personnes de leur choix pour les aider à voter.
4.7. Personnel électoral
Le personnel électoral était en moyenne de 3 à 4 membres par bureau de vote. Dans la majorité des cas, les membres des bureaux de vote ont fait preuve d’une bonne maitrise des procédures. Ils ont collaboré en bonne intelligence avec les délégués des candidats dans l’exercice de leur mission.
4.8. Déroulement du scrutin
Le scrutin s’est déroulé de façon pacifique et sereine dans tous les bureaux de vote observés sur l’ensemble du pays. Il n’y a pas eu d’incidents majeurs constatés par l’équipe d’observation électorale de l’UA.
4.9. Secret du vote
Les urnes étaient scellées dans la plupart des bureaux observés. L’emplacement des isoloirs a été amélioré dans les bureaux de vote. Les résultats consignés dans les procès-verbaux étaient placés dans des enveloppes scellées. Ce qui contribue à renforcer le secret du vote comme gage de sincérité et de régularité du scrutin.
4.10. Représentation des candidats dans les bureaux de vote
La Mission a constaté avec satisfaction que les délégués des candidats, pour la plus part des jeunes, étaient présents dans les bureaux de vote. Ils avaient une bonne maîtrise des procédures. Ils détenaient la liste des électeurs qui leur permettait de mieux suivre et de vérifier le vote des citoyens.
4.11. Sécurité
La sécurisation du processus électoral était assurée par les forces de défense et de sécurité nationales assistées par l’ECOMIB conformément au Plan d’action commun initié dans le cadre de leur Commandement Conjoint. Cette coopération a permis d’assurer la sécurisation du vote sur l’ensemble du territoire national. Ces forces avaient une présence dissuasive mais discrète. En outre, les agents de la CNE ont contribué à sécuriser les bureaux de vote.
4.12. Clôture et dépouillement
Les bureaux de vote observés ont clôturé à l’heure légale (17h00). Le dépouillement des bulletins de vote s’est globalement bien déroulé devant les délégués des candidats et le public. Les résultats ont été affichés devant les bureaux de vote après remplissage et signature des procès-verbaux par le personnel électoral et les délégués des candidats qui en ont reçu copie.
4.13. Participation de la communauté Internationale
La MOEUA constate avec satisfaction les efforts fournis par la Communauté internationale notamment le Groupe P5, la Mission Conjointe CEDEAO-UA-ONU et les autres partenaires techniques et financiers qui ont bien voulu assister la Guinée-Bissau dans l’organisation de cette élection. La Mission se félicite de l’appui technique de la CEDEAO et sécuritaire de l’ECOMIB. Elle salue également les efforts financiers et logistiques du PNUD et des autres partenaires. Elle est enfin très sensible aux efforts de coordination initiés pour harmoniser les positions de la Communauté internationale afin de concourir à la stabilisation durable du pays.
5. CONCLUSION
La MOEUA félicite le peuple Bissau-Guinéen pour sa maturité politique et son appropriation du processus électoral. Elle a constaté que le scrutin s’est déroulé dans la paix et la sécurité nécessaires à la libre expression du suffrage. Nonobstant quelques rares incidents, la campagne électorale et le vote se sont bien déroulés sur l’ensemble du territoire. L’élection a été globalement libre, régulière et transparente.
La MOEUA salue l’esprit de patriotisme et de fair-play des deux candidats en lice. Elle lance un appel au calme et à la retenue à leurs partisans, en attendant la proclamation officielle des résultats par la CNE.
Elle remercie les autorités étatiques, la CNE, les CRE, les candidats, les membres de la société civile et les partenaires techniques et financiers pour avoir bien voulu échanger avec elle.
6. RECOMMANDATIONS
La MOEUA recommande :
Au Gouvernement et à l’Assemblée Nationale Populaire de :
• Œuvrer à la préservation de la paix sociale et de l’unité nationale.
• Renforcer les moyens de la CNE pour lui permettre de mieux accomplir ses missions ;
• Améliorer le système de recensement électoral ;
• Impliquer davantage la société civile aux processus électoraux notamment dans l’observation des élections.
• Doter les citoyens de duplicata en cas de perte de leurs cartes d’électeurs ;
A la CNE de :
• Renforcer et harmoniser le monitoring du personnel électoral dans les bureaux de vote sur l’ensemble du territoire ;
Aux candidats de :
• Recourir aux voies légales en cas de contestation électorale ;
• Promouvoir le genre et les jeunes dans la vie politique;
• Privilégier le consensus et la compétition des idées ;
• Veiller à éviter les conflits identitaires ;
• Contribuer à la préservation de la paix sociale et de l’unité nationale.
A la Communauté internationale de :
• Poursuivre son soutien à la Guinée-Bissau dans ses efforts de consolidation des acquis démocratiques afin d’induire la paix, la stabilité, l’Etat de Droit et le développement durable.
Fait à Bissau, le 30 décembre 2019
Pour la Mission,
Son Excellence Dr. Joaquim Rafael BRANCO
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