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Discours du Président de la Commission de l'Union africaine, S.E. M. Moussa Faki Mahamat, à la 36ème Session ordinaire du Conseil Exécutif

Discours du Président de la Commission de l'Union africaine, S.E. M. Moussa Faki Mahamat, à la 36ème Session ordinaire du Conseil Exécutif

février 06, 2020

Monsieur le Président du Conseil Exécutif,
Mesdames et Messieurs les Membres du Conseil,
Monsieur le Vice-président de la Commission de l’UA,
Mesdames et Messieurs les Commissaires,
Madame la Secrétaire exécutive de la CEA,
Monsieur le Président du Comité des Représentants permanents,
Mesdames et Messieurs les membres du Comité,
Mesdames et Messieurs les chefs des organes de l’Union africaine,
Mesdames et Messieurs les Chefs exécutifs des Communautés économiques régionales,
Distingués Invités,
Mesdames et Messieurs

Mon premier propos sera de vous adresser mes vœux les meilleurs pour cette nouvelle année 2020. Je voudrais souhaiter qu’au cours de cette année, et plus que par le passé, vos inlassables efforts en vue de bâtir une Afrique sur de solides fondations économiques et politiques se poursuivent avec une détermination, toujours nourrie à la sève du panafricanisme et de la performance. C’est l’objet de la réforme institutionnelle de notre Union depuis son lancement au Sommet de Kigali au Rwanda en juillet 2016.
La Commission de l’Union africaine, de concert avec les autres organes de l’Union, s’est attelée à approfondir ce nouveau schéma, tâche qui consiste entre autres à l’amélioration de la gouvernance administrative et financière, la restructuration, l’obligation redditionnelle, la, la cohérence entre les organes, la division du travail et le financement de l’organisation.
Des avancées sont enregistrées dans la construction de la nouvelle Union. Nous le savons tous, la réforme n’est pas la révolution, elle est un processus de transformation qui se poursuit.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
En ouverture de vos travaux, je voudrais donc m’assigner le devoir de partager avec vous, dans leurs grandes lignes, les activités menées au titre de l’année 2019, les perspectives pour l’année en cours et surtout les défis les plus évidents. Le bilan que je vais présenter figure à l’actif de l’étroite collaboration que la Commission a entretenue tout au long de l’année avec le Comité des représentants permanents dans un climat de consensus au travers d’un dialogue constructif qui a donné un coup de fouet significatif à l’avancement de l’agenda comme vous aurez à le noter dans les documents soumis à votre examen.
Vous me permettrez donc, Mesdames et Messieurs les Ministres, de saluer le remarquable travail accompli par le COREP sous la vigilance critique et le savoir-faire de son président, l’Ambassadeur Osama ABDELKHALEK, Représentant permanent de la République arabe d’Egypte.
Les travaux préparatoires au lancement effectif de la zone libre-échange continentale africaine prévue le 1er juillet 2020 sont à un stade d’avancement qui traduit les efforts déployés par les différents acteurs. En vue de ce lancement, son secrétariat sortira des fonts baptismaux dès la fin du mois de mars prochain pour prendre en mains, avec la compétence requise, la gestion des questions restées en suspens et dont la résolution conditionnera le succès de sa pleine opérationnalisation.
Comme vous le savez, la mise en place d’une zone de libre-échange d’une telle envergure est un processus laborieux. La participation de tous les Etats membres aux réunions de négociations constitue la clé du succès du processus afin de réaliser ce rêve longtemps caressé par les pères fondateurs de notre organisation.
Pôle d’impulsion de cohérence économique, la zone de libre-échange interpelle notre créativité et davantage notre parfaite maitrise de la technologie numérique. C’est dans cette perspective que la Commission de l’UA a travaillé, tout au long de l’année, au projet de la Stratégie pour la transformation numérique de l’Afrique pour la période 2020-2030 ainsi qu’à la réalisation du projet du Réseau électronique africain. Au cours de vos travaux, vous aurez à vous prononcer sur ce projet de stratégie qui est un document d’orientation, mais d’une très grande importance pour l’avenir numérique du continent.
En lien avec la problématique numérique, la Commission a également élaboré, dans le contexte plus large de la formation de la jeunesse, un Plan d’action au titre de la décennie africaine pour la formation technique, professionnelle et entrepreneuriale et l’emploi des jeunes.
Elle travaillera en étroite collaboration avec les Etats membres pour que sa mise en œuvre soit le levier à partir duquel se développe un nouveau paradigme dans le domaine de la formation en Afrique. Dans la continuité de cette vision, la Commission s’est aussi penchée sur l’agenda social et développé le Plan d’action décennal pour l’élimination du travail des enfants, du travail forcé, de l’esclavage moderne et de la traite des êtres humains en Afrique pour la période 2020-2030.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
En matière de développement rural et d’agriculture, la Commission a présenté son deuxième rapport d’examen biennal sur la mise en œuvre de la Déclaration de Malabo sur la croissance et la transformation accélérées de l’agriculture en Afrique en vue d’une prospérité partagée et de meilleures conditions de vie. Il en ressort que les Etats membres ont, à juste titre, mis l’accent sur la nécessité de rendre plus performants les comités sectoriels. A ce sujet, la Commission a reçu des orientations afin d’améliorer les termes de référence de ces comités et de les centrer autour d’éléments constitutifs d’efficacité.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mis en œuvre de façon harmonisée, les plans d’action visés plus haut pourraient avoir un impact positif sur la réduction quantitative des flux des réfugiés, poussés pour la plupart d’entre eux vers des destinations inconnues du fait de la misère. Dans la perspective de cette mise en œuvre, la Commission en collaboration avec les Etats membres, a initié une série d’actions allant dans le sens de l’amélioration des conditions de vie des réfugiés. Au nombre de celles-ci, il convient de citer en très bonne place, le protocole d’entente relatif aux migrants conclu entre la République du Rwanda, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés (HCR) et la Commission de l’UA.
Si par essence, les solutions humanitaires sont provisoires, il nous faut résolument nous attaquer aux causes profondes des déplacements forcés pour y apporter les réponses appropriées. A ce titre, la Commission a pris une part active à l’atelier organisé par le Rwanda en octobre dernier sur cette question, lequel s’inscrivait dans la recherche des solutions africaines aux problèmes africains.
Permettez-moi ici de féliciter le Rwanda pour les mesures fortes prises pour le rapatriement des migrants de Libye et de l’accueil de certains sur son territoire. Je voudrais aussi exprimer notre reconnaissance à l’action du Président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, Champion du thème sur la problématique des réfugiés. Il a entrepris, entre autres, des visites des camps de réfugiés notamment le Camp de tsoré ici en Ethiopie. Il a également contribué à la construction des Ecoles.
Je ne saurai clore ce chapitre humanitaire sans faire référence aux nouvelles menaces que représentent la maladie à virus ébola qui fait des ravages importants dans la région des Grands Lacs et le coronavirus dont la propension inquiète et qui requiert une attention soutenue de nos institutions de santé publique.
En vue de la prévention et du contrôle des maladies, Africa CDC a déployé plus de 65 experts depuis l’apparition de la maladie à virus Ébola dans l’Est de la RDC tout en mettant à disposition des équipements de laboratoires et des médicaments. Africa CDC a établi aussi des centres opérationnels dans les pays voisins à risque, notamment en Ouganda et au Soudan du Sud. Une réunion des ministres de la santé s’est tenue à Goma le 21 octobre dernier, et facilitée par la Commission, en étroite coopération avec l’OMS. Les ministres ont convenu de la mise en place de mécanismes de collaboration transfrontalière pour apporter une réponse commune à cette terrible maladie et contrer sa propagation.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Au plan de la gestion interne, la Commission a poursuivi ses efforts en vue de mettre en œuvre les décisions des organes délibérants relatives à une gestion transparente et axée sur les résultats. Le comité des 10 experts des Etats membres, chargé d’améliorer le processus de recrutement au sein de l’Union est à l’œuvre et travaille à l’atteinte de l’objectif recherché, celui de plus célérité, de transparence et d’objectivité.
Par ailleurs, suite au constat d’irrégularités, des sanctions ont été prises à l’égard du personnel reconnu fautif. Toutefois, l’étendue du travail commande l’option raisonnable d’approfondir davantage les enquêtes, ce qui induit plus de temps. Des mesures et sanctions additionnelles compléteront celles déjà prises, notamment dans le cadre de la gestion du fonds de la paix. De même que la mise en œuvre des décisions antérieures prises par votre Conseil se poursuit méthodiquement.
Quant au processus de la réforme de la Commission, un puissant coup d’accélérateur a été donné par la finalisation du projet de la nouvelle structure qui est soumis à votre examen et adoption. Dans ce sillage, les dispositions préparatoires en vue de l’élection de la nouvelle Commission en février 2021 sont en train de se mettre progressivement en place avec la constitution du panel de hautes personnalités chargées d’accompagner le processus de sélection de candidatures aux différents postes de l’exécutif de la Commission. Le panel a déjà tenu sa session inaugurale les 3 et 4 février à l’effet de convenir de son plan d’action.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
La volonté et les efforts mobilisés afin de bâtir une Afrique solide dans ses fondations, sont menacés d’être sapés par le défi sécuritaire. La montée en puissance des terroristes et extrémistes djihadistes, attestée par des attaques meurtrières à répétition qui endeuillent nos populations, jettent les survivants sur la route de l’exil et des déplacements forcés, ceci constitue un sujet permanent de préoccupation.
Le conflit en Libye, les menaces des djihadistes Al Shebab en Somalie, au Mozambique, dans la région du Sahel et dans le pourtour du bassin de Lac Tchad, la montée du populisme marquée par les replis nationalistes et ethno-identitaires, l’extrémisme et le radicalisme, pour ne citer que ceux-là, nous renforcent dans la conviction que le thème de l’année «Faire taire les armes : créer des conditions propices au développement de l’Afrique» est plus que pertinent. Seulement, l’horizon temporel initialement fixé à la réalisation de ce projet phare de l’Agenda 2063, à savoir 2020, est déjà là et cette échéance échue révèle davantage la complexité de la problématique sécuritaire en Afrique.
Nous devons donc, en réfléchissant sur le thème de l’année 2020, interroger, entre autres, notre doctrine en matière sécurité et, au-delà des causes apparentes, nous questionner sur les causes profondes. En bref, il nous faut construire la paix autrement, en mettant en œuvre des solutions innovantes qui relativisent la solution militaire en l’assortissant des mesures relevant d’autres registres, notamment le développement et le tout dans la solidarité.
Si nous devons nous réjouir des avancées de la démocratie sur le continent avec l’organisation et la tenue d’élections libres et transparentes, il faut également relever comme un défi non négligeable les contestations pré et post-électorales qui alourdissent le climat politique et social. C’est pourquoi je voudrais, une fois de plus, saluer l’initiative prise par le Comité de représentants permanents de créer en son sein un sous-comité des droits de l’homme, de la démocratie et de la gouvernance.
Je voudrais sur ce point des droits de l’homme, me féliciter des efforts de la République du Tchad qui, de façon progressive et résolue, travaille avec le Commission pour la mise en œuvre effective des décisions des Chambres Africaines Extraordinaires dans le cadre du procès de l’ancien président Hissein Habré. Des pas décisifs ont été franchis par la signature de l’Accord de siège et la mise à disposition d’un bâtiment devant abriter le secrétariat du Fonds d’indemnisation au profit de victimes. Ces avancées enregistrées permettront la tenue très bientôt de la conférence de mobilisation des ressources pour alimenter ce Fonds.
Mais je dois aussi sur ce chapitre, le dire avec consternation, que l’opérationnalisation de la Cour hybride au Soudan du Sud n’avance guerre. J’appelle votre Conseil à se saisir davantage de la question. La Commission quant à elle restera attentive à toute démarche susceptible de permettre l’effectivité de cette cour.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Je voudrais terminer en partageant avec vous les préoccupations de la Commission sur la question du partenariat. L’année 2020 sera articulée autour d’un certain nombre de réunions de partenariat au sommet. Mais bien au-delà de l’organisation matérielle de ces réunions, la problématique de l’évaluation de leur contenu, de la définition de notre vision stratégique et de la participation, requièrent l’attention de votre Conseil. Une claire orientation sur le sujet est nécessaire afin de permettre à la Commission et aux Etats membres de parler d’une seule voix, gage de notre crédibilité.
En vous souhaitant de fructueuses délibérations, je vous remercie de votre aimable attention.

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